« Nous avons validé à Grenoble la viabilité de notre "méthode LEMON" dont l’objectif est d’inventer les solutions de mobilité de demain. Son principe : innover par l’expérimentation terrain. Nous travaillons dans la rue, aux côtés des habitants, en apprenant au fur et à mesure. Et surtout : avec le droit à l’erreur. » Voilà comment Julien Réau, directeur innovation chez Transdev, résume l’approche expérimentale LEMON, en passe d’être déployée dans sept nouvelles villes françaises (Lens, Montpellier, Le Havre, Mulhouse, Nîmes, Auxerre et Libourne). Une approche « inédite en France dans les transports urbains », assure l’opérateur de transport.
Cette méthode "agile" est pourtant bien connue dans l’univers des nouvelles technologies. LEMON (pour "laboratoire d’expérimentation des mobilités") est une déclinaison du concept de "Test and Learn", largement exploité par les start-up. L’idée principale est d’avancer à tâtons, en testant le plus rapidement possible un concept sur le terrain, afin d’obtenir les retours d’utilisateurs en contexte réel. « Le projet prend vie sur le terrain. Il implique les usagers en faisant émerger leurs besoins. On teste des idées, on les évalue. En fonction des retours, on réoriente l’expérimentation autant de fois que nécessaire », précise-t-on chez Transdev. Principaux avantages de cette approche : les projets finalisés correspondent aux besoins réels des utilisateurs et les délais de développement sont considérablement réduits.
En revanche, les collectivités partenaires doivent accepter que certains projets n’aboutissent pas. Une idée qui déconcerte parfois certains d’élus. « Il faut beaucoup communiquer auprès de la population. Expliquer que cette approche constitue un bon usage de l’argent public, car au final les solutions sont au plus près des attentes des citoyens », poursuit-on chez Transdev.
Co-construction avec les habitants et la collectivité
Chaque projet LEMON est le fruit d’une collaboration entre trois acteurs : la collectivité locale, l’exploitant du réseau de transport et Transdev. Les idées émergent lors d’échanges avec les élus locaux. Ensuite, des partenaires sont identifiés pour réaliser des premiers prototypes, notamment des start-up. Enfin, cet "écosystème local de partenaires" teste différentes versions de la solution auprès de citoyens volontaires, à l’échelle d’un quartier, d’une ville ou d’une agglomération.
« Nous co-construisons les solutions avec les habitants, les élus et des entreprises. Depuis 2014, le laboratoire LEMON de Grenoble a réalisé une douzaine d’innovations », souligne Christine Chary, responsable partenariats public/privés chez Transdev.Parmi les principales réalisations grenobloises : "Chrono en marche !" (aménagements urbains pour rendre le bus plus attractif, de la signalétique au sol pour se rendre aux arrêts à l’éclairage d’abri-voyageurs), "GreenZenTag II" (mesure de la qualité de l’air via des microcapteurs installés sur les bus), "Chronopro" (transport à la demande avec réservation 100 % digitale, sur le web ou sur smartphone).
Comme attendu, certains projets n’ont pas abouti. Une première version de GreenZenTag, basée sur des capteurs installés sur les trams,a posé d’importants problèmes techniques. Le test d’une ligne de covoiturage n’a pas été concluant, car le trafic sur le parcours n’était pas suffisant pour rendre le service attractif. « Nous apprenons aussi de ces difficultés. Et comme nous allons désormais fonctionner en réseau de laboratoires LEMON, les expériences des uns profiteront aux autres. Les entreprises partenaires, notamment les start-up, pourront également expérimenter parallèlement leurs solutions dans plusieurs laboratoires LEMON, afin de les tester dans différents contextes. La multiplication des implantations devrait ainsi rendre notre méthode d’innovation encore plus efficace », estime Julien Réau.