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Après la crise : lier résilience des territoires et nouvelle économie

Aménagement du territoire
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Fouad Awada, directeur général de l’Institut Paris Region
La nouvelle phase du capitalisme sera numérique

Depuis début avril, l'Institut Paris Region publie Les Chroniques des Confins, réflexions de ses experts sur les changements à venir après le bouleversement de la crise sanitaire. Nos modes de vie et notre économie pourraient prendre des directions nouvelles, comme l’explique Fouad Awada, directeur général de l’Institut.

Quels sont les premiers enseignements de la crise sanitaire en matière de résilience des territoires ?
La préparation à affronter des crises repose sur la connaissance des risques et la mise en place de techniques, de protocoles. Sur le plan strictement sanitaire, même si nous avions des lignes de défense comme les pompiers, le Samu, les hôpitaux, nous n’étions pas préparés à absorber un tel choc. De plus, en Ile-de-France, il est apparu que nos logements n’étaient, souvent, pas adaptés au confinement.
Mais la résilience, ce n’est pas simplement pouvoir absorber les chocs ; c’est aussi pouvoir rebondir, c’est pourquoi notre capacité à redémarrer une vie économique et sociale est à prendre en compte. Et de ce point de vue, nous avons bénéficié d’un système de gouvernance agile qui nous permet d’éviter le pire. Les décisions de l’Europe, de l’Etat et des collectivités locales pour aider les entreprises et les individus, sont exceptionnelles. Autre élément fondamental pour la résilience : nous avons un très bon niveau d’équipement numérique, ce qui permet notamment le télétravail, le télé-enseignement, la téléconsultation.

 

S’il y a un bon niveau global en France, la fracture numérique existe néanmoins…
Effectivement, des ménages rencontrent des difficultés économiques à s’équiper et à comprendre le monde numérique. Ce sont des handicaps dans cette crise. Il y a également un rejet du numérique comme on l’a vu avec certains établissements scolaires qui ont par exemple refusé le passage systématique au numérique. Aujourd’hui, ça pose problème. La région et les départements d’Ile-de-France se sont mobilisés pour envoyer, en urgence, des tablettes à des lycéens par exemple, tout comme à des personnes âgées dans les EHPAD. L’Etat vient de lancer une initiative similaire en direction des scolaires de familles modestes. Il va falloir tirer les enseignements de tout ça pour mieux faire accepter le numérique partout.

 

Dans la Chronique des Confins n°1, publiée sur le site de l’Institut Paris Region vous mentionnez le capitalisme numérique pour imaginer l’économie de demain. Expliquez-nous ce concept ?

Actuellement, le capitalisme est en débat, certains disent qu’il est à bout de souffle. Selon l’économiste Daniel Cohen, le capitalisme est une manière de produire au plus bas prix en cherchant à diminuer les coûts. Jusqu’à présent, on y est parvenu grâce à une sous-évaluation des ressources naturelles, à la mécanisation-robotisation et, depuis 20 ans, grâce aux délocalisations dans les pays à bas coût de main d’œuvre. Avec la mise en cause de la mondialisation et de la prédation des ressources, Daniel Cohen estime que le gisement de réduction des coûts qui va prendre le relais est le numérique – les imprimantes 3D, le télétravail, l’intelligence artificielle… La nouvelle phase du capitalisme serait donc numérique.

 

Une autre piste que vous évoquez, c’est le localisme…
La proximité est une piste qu’il faut absolument creuser. L’idée est de pouvoir trouver une diversité de choses à une certaine échelle pour ne pas dépendre de ce qui se passe à l’autre bout du monde. Au nom de la souveraineté, la France va tenter après la crise de réimplanter certaines industries stratégiques (industrie pharmaceutique, sécurité informatique…) sur le territoire.
L’une des questions, c’est comment appliquer ce principe de moindre dépendance au niveau d’une région ou d’un département. En Ile-de-France, nous concentrons 20% de la population sur 2% du territoire, donc tout n’est pas envisageable, on ne pourra pas, par exemple, avoir une autonomie alimentaire.

 

On a l’impression que la résilience est de plus en plus une posture "idéologique", philosophique, et qu’elle entre en résonnance avec un choix de vie. Est-ce que le sujet concerne toujours les urbanistes ?
Les urbanistes sont interpelés sur des questions comme « la densité est-elle dangereuse en cas de crise sanitaire ? » « Comment la nature en ville pourrait être un plus pour notre santé ? » « Quelle alternative aux transports en commun pour respecter la distanciation physique ? »… Le sujet de l’urbanisme tactique est sur le devant de la scène, c’est-à-dire comment saisir une situation pour imaginer des villes et des équipements adaptés quitte à ce qu’ils soient réversibles. En fait, les urbanistes n’ont jamais été autant interpellés, et la principale question qu’on leur pose est : comment faire des villes plus humaines, au développement raisonnable ?

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