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La smart city aime-t-elle les pauvres ?

Inclusion

Avec la provocante assertion "La smart city n’aime pas les pauvres", le think tank OuiShare a attiré les foules lors d’un débat rassemblant architectes, entrepreneurs sociaux et industriels. La ville, en devenant intelligente, exclut-elle vraiment une partie de ceux qui la composent ? 

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"La smart city n'aime pas les pauvres!", une rencontre organisée par OuiShare aux Grands Voisins.

En plein cœur de Paris, le tiers-lieu Les Grands Voisins a accueilli le 15 février dernier quatre experts pour échanger autour de l’affirmation "La smart city n’aime pas les pauvres". Derrière cet événement, le collectif OuiShare qui a décidé d’agiter les réflexions sur la ville en préparation du OuiShare Fest, un grand rassemblement estival dont l’édition 2017 aura pour thème "Cities of the world, unite !"
Le postulat ? Dans la ville intelligente, où se mêlent capteurs communicants, big data, applications mobiles et autres véhicules autonomes, les pauvres n’ont pas leur place. Ils seraient repoussés en dehors de ces territoires en pleine réorganisation urbaine grâce aux nouvelles technologies. Architectes, acteurs associatifs, industriels, tous sont unanimes : longtemps pratiqué, le solutionnisme technologique – tenter d’apporter une réponse technologique à toutes les problématiques, en l’occurrence urbaines –, ne prend pas suffisamment en compte l’humain et exclut une partie de la population.

 

La technologie à outrance exclut les pauvres

En l’état, la ville intelligente creuse la fracture entre ceux qui maîtrisent – et utilisent – les services numériques proposés par une collectivité et ceux qui n’y ont pas accès, soit par un non-usage des outils informatiques tels qu’un ordinateur ou un smartphone, soit par leur non-possession faute de moyens financiers. De plus, les services publics proposés attirant de plus en plus de personnes sur un territoire, les loyers augmentent et la smart city éloigne indirectement les classes sociales les moins aisées. « Nous devons donc lutter contre la ségrégation renforcée par la technologie, insiste Constantin Petcou co-fondateur de l’atelier d’architecture autogérée et coordonnateur du projet R-Urban, qui plaide pour « une smart city pondérée et accessible». À ses côtés, Dominique Alba, directrice générale de l'Atelier Parisien d’Urbanisme - l’agence d'urbanisme de la ville de Paris et de sa métropole – poursuit : « la smart city génère une forme d’inégalité territoriale. Prenons l’exemple de l’installation de la fibre optique : elle n’est pas déployée dans toute la métropole, et les industriels agissent d’abord dans les zones où des infrastructures existent déjà... » Plus que des personnes, ce sont des territoires qui sont ces "pauvres" mal-aimés par la ville intelligente.

 

Remettre l’humain dans la réflexion

Pour autant, le débat a également soulevé l’intérêt des technologies pour l’inclusion sociale, si tant est qu’elles soient utilisées à bon escient. Les plates-formes de l’économie collaborative favorisent ainsi l’accès à des biens de manière ponctuelle, par exemple une voiture, pour des personnes qui n’auraient pas les moyens d’en posséder une. Paul Citron, directeur du développement de Plateau Urbain, ajoute l’exemple de son association qui met en lien des propriétaires fonciers et des porteurs de projets, notamment sociaux. « Les outils numériques facilitent la mise à disposition des bâtiments et nous permettent d’agir à plus grande échelle. En fait, la smart city n’est ni plus ni moins "pauvrophobe" que la ville traditionnelle. Les technologies ne réduisent pas les inégalités... c’est bien aux politiques de le faire ! » Un point de vue partagé par Emmanuel Schneider, directeur du programme d'accélération digitale de CISCO : « les véhicules autonomes sont une brique pour régler le problème de congestion d’une ville. Elle vient s’ajouter à d’autres actions mises en place dans le cadre d’une politique de mobilité. » La technologie, seule, ne rend donc pas la ville plus intelligente, de même qu’elle n’améliore pas l’inclusion sociale ; la vision du politique et les actions menées par une collectivité demeurent la clé.

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