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Résilience des infrastructures : comment la renforcer, avec quel financement ?

Infrastructures

Les réseaux de communication français (fibre et mobile) sont en partie exposés à des risques divers (tempêtes, sabotage, incendie…) qui compromettraient leur fonctionnement en cas de survenue. Comment assurer la résilience d’une infrastructure devenue indispensable à la vie du pays ? C’est la question que pose, avec celle de son financement, l’étude Infranum/Banque des Territoires sur la résilience des infras numériques.

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de gauche à droite : Thomas Gassilloud, Eric Jammaron, Antoine Darodes et Yann Breton.

Que se serait-il passé si, pendant les périodes de confinement et de limitation des déplacements que nous a imposé la crise sanitaire, les réseaux de communication étaient tombés ? Ou que se passerait-il si des tempêtes comme Alex [septembre 2020] ou celle de 1999 (qui a fait tomber les réseaux mobiles et les réseaux électriques), frappaient à nouveau le territoire ?
Dans un contexte de numérisation croissante des services de l’Etat, des collectivités territoriales, des entreprises et de la vie de tout un chacun, la réponse de Philippe Le Grand, président d’Infranum (Fédération professionnelle qui fédère 220 entreprises des infrastructures numériques) est sans équivoque : « cela aurait eu un impact de plusieurs milliards d’euros de pertes pour le pays. Nos infrastructures étaient utiles, elle sont devenus essentielles ».

Aujourd’hui, si le risque sanitaire s’amenuise, d’autres menaces montent. C’est le cas des risques de tempête et d’incendie dus au changement climatique ou encore celui du sabotage intentionnel des installations, qui prend une ampleur croissante. Et ces risques peuvent se combiner.
« Si la conjugaison du pire arrive, il y a aurait des vies en péril, ajoute Philippe Le Grand. Nous devons mesurer la gravité et le vraisemblable. Il faut évaluer notre capacité à minimiser les risques ».
Dans ce but, Infranum et la Banque des Territoires ont commandé au cabinet Onyx une étude qui fait apparaître cinq familles de risques : la malveillance, la fragilité des 50 000 km de fibre aérienne, les non-conformités et malfaçons de déploiement, l’intervention sur des réseaux en exploitation et la capacité de gestion de crise, « qui ne peut pas se prévoir mais qui peut se préparer ».

Or, cette mise en ordre de bataille pour assurer la résilience des infrastructures numériques aura un coût, qu’on estime à 10 milliards d’euros pour le seul enfouissement de la fibre optique déployée en aérien. La filière ne pouvant assumer seule un tel investissement, Infranum demande au nouveau gouvernement l’organisation d’un ‘’Grenelle de la résilience’’, afin « d’améliorer la coordination des intervenants et assurer la sécurité de nos infrastructures numérique ». La fédération préconise de « s’organiser au niveau national et local » et propose d’entrer « dans le détail des besoins des collectivités » pour que celles-ci s’engagent ensuite sur [ses] propositions.


Les collectivités en première ligne

A l’occasion de la table ronde qui a suivi la présentation de cette étude sur la résilience, plusieurs points de vue sont venus étayer cette analyse, comme celui de Thomas Gassilloud, député LREM de la 10ème circonscription du Rhône et auteur en 2021 d’un rapport sur la résilience nationale ; un rapport visionnaire puisqu’il anticipait déjà l’invasion de l’Ukraine par la Russie. S’agissant des infrastructures numériques, le député (par ailleurs ancien opérateur télécom) explique : « nous pouvons avoir une situation de risque cumulative. Notre résilience individuelle se réduit, parce que nous sommes tous de plus en plus dépendants du numérique. Beaucoup de personnes et d’entreprises ne savent pas fonctionner sans internet ».
Un constat partagé et complété par Yann Breton, directeur du syndicat mixte Gironde numérique : « un arrêt du numérique est un arrêt du service public, puisque tous les réseaux sont pilotés par le numérique et ils sont interdépendants ». A cela s’ajoute la fragilité des réseaux électriques, sans lesquels le numérique ne peut pas fonctionner, ce qui rajoute un point de fragilité.
« Les gens travaillent à domicile, on ne peut pas se priver du numérique, même chose pour les entreprises, on ne peut pas accepter 48 h de panne. Si une tempête comme celle de 1999 arrivait à nouveau, ajoute-t-il, je serai inquiet, car nous sommes aujourd’hui beaucoup plus dépendants des réseaux numériques ».


Comment financer la résilience ?

Reste que si le constat des risques et de la nécessité de les gérer sont partagés de manière univoque, la question du financement reste pour le moment à explorer. « Qui va payer ?, s’interroge Yann Breton, car on n’a pas mis l’argent pour cela ». Et les opérateurs commerciaux n’ont pas plus provisionné de tels investissements que ceux des RIP (réseaux d’initiative publique).
« Il y a un besoin d’investissement, admet Antoine Darodes, directeur des investissements à la Banque des Territoires. Nous regardons ce que nous pouvons faire en tenant compte des solidarités territoriales, car les risques et les moyens sont différents parce qu’il s’agit d’investissements de long terme, il faudrait aller au moins jusqu’à la fin de la décennie. Dégager quelques cents par mois par accès, sur 30 millions d’accès, ce n’est pas énorme. Mais il faudrait pour cela qu’Orange et les opérateurs de RIP se mettent autour de la table pour voir comment on peut financer un tel projet ».
En attendant le renforcement des infrastructures existantes, le député Gassilloud propose pour les déploiements à venir d’instaurer « la cyber sécurité et la résilience by design », sans perdre de vue « l’évaluation du risque par rapport à l’investissement ».
Autant de sujets de discussion à mettre sur la table avec Jean-Noël Barrot, le nouveau Ministre délégué chargé de la Transition numérique et des Télécommunications…

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