Fournir 2 millions de matériels informatiques reconditionnés à des ménages modestes d’ici 2027. Tel est l’un des objectifs de la feuille de route France Numérique Ensemble, présentée en 2023 par le gouvernement. Depuis deux ans, les collectivités déclinent déjà au niveau local ce dispositif national en faveur de l’inclusion numérique. La question du reconditionnement de matériel informatique se pose donc de plus en plus pour les territoires.
« Les collectivités peuvent s’appuyer sur la dynamique créée par la stratégie France Numérique Ensemble qui a permis de mettre tous les acteurs autour de la table et de définir des feuilles de route locales en faveur de l’inclusion numérique », estime aujourd’hui François Blouvac, responsable Inclusion numérique et accès au droit, économie sociale et solidaire, éducation et formation professionnelle de la Banque des Territoires.
Car la filière du reconditionnement informatique est en plein essors, conclut une récente étude de la Banque des Territoires. Elle a identifié 340 structures actives opérant 397 ateliers dans 94 départements. Côté profils : il s’agit à 53 % d’associations et à 47 % d’entreprises solidaires. « Ensemble, elles reconditionnent 4,3 millions d’appareils par an (dont 2,7 millions de PC et 1,6 million de smartphones) dont 250 000 PC distribués chaque année à des publics fragiles », peut-on lire dans l’étude. L’objectif de la feuille de route France Numérique Ensemble serait donc atteignable, bien que ambitieux, estime la Banque des Territoires. « C’est déjà une base solide, mais il faut la renforcer ».
Un besoin de coordination locale
Si elle connaît un forte dynamique, la filière demeure encore fragile, temporise l’étude. Elle a identifié cinq difficultés auxquelles fait face la filière : le manque de matériel de qualité, une logistique coûteuse, un manque de main d’œuvre formée, des financements précaires et un besoin de coordination locale.
Face à cette situation, la Banque des Territoires propose un plan d’action en trois volets, dont plusieurs concernent les collectivités :
• Sécuriser l’approvisionnement : sensibiliser et inciter au don, mobiliser la commande publique (lois AGEC , REEN ).
• Professionnaliser la filière : mutualiser les moyens logistiques, développer des labels qualité, former des « agents de reconditionnement numérique ».
• Privilégier des actions au niveau local en créant des « boucles locales » vertueuses (collecte – reconditionnement – distribution) animées par les collectivités.
Les collectivités sont donc invitées à montrer l’exemple en intégrant le reconditionnement dans la commande publique, notamment via des « schémas de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables (SPASER) », précise l’étude.
Des territoires animateurs de boucles locales de reconditionnement solidaire
Les collectivités peuvent aussi animer des « boucles locales de reconditionnement solidaire ». Il s’agit d’initiatives associant acteurs publics et reconditionneurs pour trouver du matériel et répondre aux besoins des publics précaires. Concrètement, que peuvent faire les territoires pour animer ces boucles locales ? Les territoires peuvent participer à l’identification et à la coordination des gisements, des reconditionneurs et des bénéficiaires.
L’étude identifie cependant quelques obstacles auxquels font face les territoires pour animer ces boucles locales. « Les décideurs publics sont encore peu documentés sur le sujet, et ne savent souvent pas vers quelle(s) structure(s) se tourner pour engager leur projet ». La Banque des Territoire peut cependant aider les collectivités à mieux connaître la filière et ses enjeux. « Partenaire historique de l’Etat et des acteurs locaux, la Banque des Territoires est pleinement engagée dans l’accompagnement des politiques publiques d’inclusion numérique sur l’ensemble de la chaîne de valeur », souligne ainsi François Blouvac.
Car selon l’étude : deux tiers des structures interrogées indiquent ainsi que le manque ou l’absence de portage politique local est un frein à la mise en œuvre de boucles locales de reconditionnement. Au final : « les collectivités peuvent jouer un rôle d’impulsion et de coordination pour structurer l’activité de reconditionnement à l’échelle locale », conclut François Blouvac.
L’étude est basée sur un recensement inédit des reconditionneurs actifs en France notamment grâce à la mobilisation de plus de 120 relais territoriaux, une enquête administrée auprès des reconditionneurs (109 réponses exploitables) et 25 entretiens avec des acteurs. Le périmètre couvre tous les ordinateurs, tablettes et smartphones reconditionnés dans l’Hexagone et dans la plupart des DROM.