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Software République : cinq industriels majeurs ensemble sur la mobilité

Aménagement du territoire

Atos, Dassault Systèmes, le Groupe Renault, STMicroelectronics et Thales se liguent sous la bannière de Software Republique pour concevoir et commercialiser ensemble des offres intégrées de mobilité en open source à l’attention des territoires, des entreprises et des citoyens. Si l’ambition est forte, globale et souveraine à la fois, le projet industriel, lui, reste encore un peu flou…

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De gauche à droite : Elie Girard (Atos), Bernard Charlès (Dassault Systèmes), Luca di Meo (groupe Renault).

Les alliances et les collaborations industrielles sont nombreuses dans le domaine la mobilité. Et pour cause. Aucune entreprise ne maîtrise seule l’intégralité de la chaîne technique et de la chaîne de valeur d’un secteur qui exige des compétences matérielles, logicielles et data pour gérer les enjeux d’une mobilité multimodale et complexe. Et ce, d’autant moins qu’il s’agit de répondre à des besoins très variés de publics et de territoires tout aussi variés à travers le monde.

Luca di Meo, patron de Renault Group

« Ces dernières années, explique Luca de Meo, le charismatique patron du groupe Renault, qui est à l’initiative de ce projet, il y a eu beaucoup d’initiatives sur la mobilité, avec de l’auto partage, des trottinettes, vélos… Or, on se rend compte que ce n’est pas le nombre d’acteurs qui fait la performance, mais plutôt l’intégration de tout cela ».
L’ambition de Software République, entité qui n’a pour le moment pas une identité juridique très précise, est de créer un écosystème ouvert d'open innovation pour développer et commercialiser conjointement des solutions et systèmes qui « enrichiront l'offre de mobilité pour les territoires, les entreprises et les citoyens ».
Cette aspiration partagée des cinq grands groupes fondateurs à une organisation « horizontale » s’explique parce que les enjeux d’une mobilité globale (la digitalisation, la transition énergétique) sont des thèmes qui touchent transversalement le secteur.
Ce prestigieux attelage, qui se déclare prêt à accueillir dans ses rangs d’autres entreprises (ETI, PME, start-up…) et des acteurs du monde académique, est une initiative 100 % privée et 100 % européenne, et se veut aussi une réponse au risque de mainmise des GAFAs sur ce secteur de la mobilité… même si l’entrée ne leur sera à priori pas interdite. Souverain dans sa composition, global dans son ambition, ce projet se veut aussi nativement vertueux sur le plan environnemental.
« La décarbonation [de la mobilité], c’est le moment d’en parler, détaille Elie Girard, le patron d’Atos. Même si les émissions CO2 se sont réduites avec la pandémie, le transport représente 24 % des émissions de CO2 dans le monde. Or, nous avons tout ce qu’il faut en Europe pour construire une mobilité intelligente et décarbonée. La Software République peut être un exemple de ce que l’Europe peut faire ».


Réinventer une chaîne de valeur

« La mobilité intelligente est tirée par les usages, ajoute Bernard Charlès, le p-dg de Dassault Systèmes, et le 21ème siècle est marqué par le passage du produit (le meilleur, le plus rapide…) à la valeur d’usage. La valeur d’usage change la perspective, c’est donc une approche nouvelle que doit être mise en œuvre pour imaginer, créer et rendre disponibles ces services. Cette horizontalité de l’innovation est un voyage excitant, parce qu’il est inclusif ».

Jean-Marc Chéry, président du directoire et directeur général de STMicroelectronics

Pour Jean-Marc Chéry, président du directoire et directeur général de STMicroelectronics, la création de nouveaux marchés, dans le contexte de concurrence acharnée que traverse le marché des composants, passe par deux choses : « travailler avec les autres et être convaincus [du projet], sans forcément attendre que tout soit prêt pour y aller ». « Dans une voiture moyenne, poursuit-il, il y en a pour 2000 euros de composants, c’est un bon business pour nous. Or, pour équiper 10 millions de véhicules, il faut investir 400 M€ en RD et 2 Mds d’euros en capacité industrielle. Il ne faut donc pas se tromper. Et pour ne pas se tromper, on travaille avec les autres ». L’intégration de STMicroelectronics dans un tel projet est d’autant plus importante qu’on pourra « de moins en moins déconnecter la partie logicielle de la partie hardware ».

 

Patrice Caine, le p-dg de Thales

A ces considérations de stratégie industrielle s’ajoutent des enjeux de souveraineté et de cybersécurité. « On peut aussi parler d’indépendance ou d’autonomie, abonde Patrice Caine, le p-dg de Thales. Avec cette alliance, nous avons fait le choix d’être maîtres de notre destin. Au sein de Software République, nous avons tout ce qu’il faut en matière de traitement des données, d’IA etc et de connectivité. Enfin, la cybersécurité n’est plus une option quand on connecte autant de choses. Il faut monter le niveau de cybersécurité des services tout en donnant plus de facilité dans les usages. Je crois que nous avons tout ce qu’il faut pour réussir ensemble ».
Pour tous ces acteurs, la 5G sera un « enabler » indispensable, notamment pour l’usage du Edge computing.


Des villes-pilote pour commencer ?

Si les contours de l’offre que compte proposer Software République ne sont pour le moment pas totalement définis, ce qui l’est en revanche c’est que l’ADN de cette alliance est davantage ancré dans la data que dans le hardware.

« Je rêve de pivoter Renault vers une boite tech qui intègre l’automobile plutôt qu’une boite auto qui intègre de la technologie », confesse Luca di Meo. Son « rêve » pour Software République, c’est « d’aller voir ensemble le maire d’une ville en Europe ou n’importe où dans le monde et de pouvoir lui dire : en six mois, on vous fait le mapping de tous les services, on intègre des véhicules adaptés à votre ville, et vous n’aurez rien à payer parce que nous allons tout financer. Nous serons en plus capables de baisser la pollution au CO2 de 20 % et augmenter la fluidité du trafic dans la ville de 15 %. Nous voulons être les meilleurs au monde en offrant ce type de services ».

Le quartier général de la Software République sera situé sur le plateau de Saclay et ses effectifs, essentiellement des ingénieurs, ont été « libérés » par les cinq sociétés fondatrices.
Chose surprenante, compte tenu de la nature des sociétés impliquées et du pedigree des dirigeants fondateurs, ni la partie économique du projet (budget, objectif, répartition du capital…) ni la gouvernance n’ont été définies. « On va commencer à mettre en commun du temps de cerveau, explique Bernard Charlès. Ensuite viendront les usages, les business models ». Pour sa part, Luca di Meo parle d’un mode de gouvernance « souple et léger ».
Les premiers « livrables » de Software République pourraient être des projets pilotes dans les villes. Celles de Toulouse, Madrid ou Milan ont été mentionnées comme des destinations possibles….

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